Premier
Capitaine d'armement au siège social des Armateurs Français.
Il était l’un des 35
membres fondateurs de l’Amicale des Caps Horniers, en
mai 1937.
Descendant d’une
lignée de capitaines, établis depuis des siècles à
l’extrême sud de la Bretagne, au centre de l’Empire du
sel, il compte dans ses ascendants des paludiers,
patrons, capitaines aux grandes pêches, baleines et
cachalots, smugglers, marchands de bois d’ébène,
aventuriers, corsaires et surtout Capitaines Long
Courriers
Né à La Bernerie en
Retz (Loire Inférieure) le 7 janvier 1877, Lacroix
bourlingua dans toutes les navigations de 1893 à 1897.
Il fit l’Inde, Madagascar, Rangoon Birmanie Anglaise,
Rio, Valparaiso, Iquique, de 1899 à 1902 sur le 3-mâts
Nantais DUCHESSE ANNE, démâté au ras du pont au Nord des
Bermudes, ce qui lui valut de passer second, pour
repartir vers son Francisco. Son capitaine (Rochat de
Binic) ayant été empoisonné, il prit le commandement du
navire, débutant par la traversée record : Saucellito,
Falmouth, en 89 jours.
Capitaine au Long
Cours en 1903, il prit à New York, le commandement du
MARECHAL DE GONTAUT, cap sur le Japon, avec du pétrole.
Interné en raison de la guerre Russo-japonaise, il
revint finalement en Europe, chargé de riz.
De 1905 à 1909,
Lacroix commanda le " BABIN CHEVAYE ". Gouvernail cassé au
cap Horn réparé par les moyens du bord, passa à Taltal
et atteint San Francisco pour le tremblement de terre
qui secoua la Californie. Reparti pour l’Australie, via
Hobart, puis le Chili. Son troisième voyage le renvoya
au Chili, Californie, Australie, Europe.
Il prit ensuite le
commandement du " JEAN " pour les voyages d’Australie et fut
nommé en 1911, capitaine d’armement. Il releva les
3-mâts " MENELICK ", " FRANCOIS ", " DAVID D’ANGERS ", " DUPLEIX
",
" MARECHAL DE CASTRIES ", " LAENNEC ", " SAINT ROGATIEN
", " LEON
BUREAU " .
Il fit la guerre de
1914 1918, pilote de la Marine Française, puis fut
réformé pour trachome.
Ensuite: Sauveteur
d’épaves sur la côte. Organisateur des pêcheries du
Socoa de 1925 à 1926. Expert d’Assurances Maritimes,
Expert au Tribunal de Commerce de Nantes de 1932 à ce
jour.
Cette formidable
activité durant près de 60 ans, n’a pas suffi à Louis
Lacroix. En complétant les collections de tous genres
rapportés par ses Ancêtres, en compulsant les vieux
parchemins poudreux, lui vint à lui, Capitaine au Long
Cours Cap Hornier, l’idée de sauver de l’oubli, la
magnifique épopée de l’Aventure et de la Grande
Navigation à la voile. Il se fit écrivain et composa
l’œuvre considérable, réelle et sincère bien connue.
Avec l’aide de ses
vieux camarades enthousiastes, il raconta les derniers
jours de la marine marchande à la voile, dont les Cap
Horniers formèrent et formeront toujours, un des plus
beaux joyaux. Depuis 1937, cherchant près de tous ses
collègues des documents vrais, Lacroix ajoute, chaque
année, une pierre de plus au monument qu’il élève à la
gloire de nos vaillants voiliers. Ce sont tour à tour, :
Les derniers grands
voiliers,
Les derniers
baleiniers Français,
Les derniers Cap
Horniers,
Baye de Bretagne,
Les Derniers
Antillais,
Les derniers voyages
de Coolies et de Merles du Pacifique,
Les derniers
écraseurs de crabes,
L’Age d’Or de la
Voile,
Les derniers
Morutiers,
Voiliers Ecole et
Pilotins.
Par sa triple
carrière de Marin, de Capitaine, et de Littérateur
Maritime, Lacroix est au premier rang dans l’œuvre
commune qu’il poursuit avec notre Amicale et nous lui en
témoignons toute notre gratitude !
Saint Malo, novembre
1950.
Le Capitaine Lacroix
est décédé en décembre 1958, et enterré à La Bernerie en
Retz
Une stèle fut
inaugurée sur sa tombe et une allocution fut prononcée
par le capitaine Georges AUBIN, le 21 avril 1960. |

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Louis LACROIX
Premier Capitaine d'Armement de notre Société.
Je viens d'apprendre le décès de Louis
lacroix,
et c'est avec mélancolie et tristesse que j'évoque, avec
un peu de ma jeunesse qui s'en va, les temps déjà
anciens du début des Sociétés " Armateurs Français " et
" Union Industrielle et Maritime ".
Louis lacroix,
capitaine au long cours, entré aux Armateurs Français en
septembre 1919, était déjà en Angleterre quand notre
Président M. Henri
cangardel
me recruta pour le rejoindre et armer les navires
destinés à la Société, en l'occurrence 7 navires en bois
et 5 en fer, disséminés de la Manche de Bristol aux
Orcades.
C'était un homme de mer, l'aspect rude, le visage
basané et barbu, la démarche ancienne marine.
Contrairement à d'autres, il n'avait pas la parole
violente et autoritaire, mais plutôt volubile il
s'exprimait de façon aimable et ferme.
Les beaux voiliers qui fréquentaient la région de
Nantes (la sienne, il était né à La Bernerie) avaient
éveillé en lui, comme chez tous les jeunes Nantais de
son époque, la vocation de la mer et il s'était donné de
toute son âme à cette profession qu'il a aimée et servie
toute sa vie.
Très jeune, sitôt reçu capitaine au long cours, il
commanda les voiliers "
Jean " et
" Babin-Chevaye
", d'autres aussi sans doute. Puis il devint pilote de
Suez et c'est ainsi qu'il se forma et acquit les
qualités qui devaient lui permettre de faire, jeune
encore, un capitaine d'Armement dont la devise, peut
être un peu poussée d'ailleurs, était l'économie, sous
toutes ses formes.
Je me rappellerai toujours notre première rencontre à
Liverpool. Il était ce jour-là aux prises avec le leader
syndicaliste anglais Jim
Larking
et, pour m'éprouver, me chargea sur le champ de régler
le différend. La prise de contact avait été sympathique,
quoique rude, et je fis sous ses directives de mon mieux
pour l'aider. Il s'en suivit une bonne amitié et une
confiance réciproque qui donna tous ses fruits à
Dunkerque, où nous avions équipé un bureau pour
l'armement et le service des 7 navires en bois. Ce
bureau, équipement LACROIX... un vrai poème !...
Ce fût une période pénible sous bien des rapports
dans ce Dunkerque de l'après-guerre, démoli et
inhabitable. Mais sa bonne humeur toujours égale et les
bonnes relations firent que la vie y avait quand même un
attrait dans l'accomplissement journalier d'un métier
difficile et sans trop de repos.
Au fil de mes souvenirs, j'y retrouve les amis du "
Veritas " et des assureurs.
le roy,
le réparateur, CORNEMUSE, le charpentier, bien d'autres
encore, hélas disparus pour la plupart, mais avec
lesquels on travailla d'arrache-pied pour franchir,
aussi bien que possible, ce cap difficile des débuts.
QuERUELLE,
qui était son secrétaire, doit se rappeler avec quelle
maîtrise il traitait les affaires d'armement.
Il ne m'appartient pas de rappeler comment notre
Président M. Henri cangardel, par sa clairvoyance, son
travail et son action féconde, transforma ces temps
pénibles en lendemains prospères. C'est l'histoire de
notre Société
Voilà qui fût Louis
lacroix.
Bon marin. Brave homme, entreprenant et courageux,
trempé au sel de mer des horizons Cap Horniers et
devenu, en fin de carrière, écrivain maritime dont les
œuvres, imprégnées de souvenirs, laissent percer son
vrai tempérament, celui d'un vieux marin sensible et
ardent pour tout ce qui toucha à son idole — La Mer.
Bel exemple d'une nature généreuse, je salue en lui
non seulement mon initiateur, mais aussi mon compagnon
de début et le vieux camarade bien connu et estimé de
notre génération.
Louis lacroix,
adieu...
Auguste
QuiBEUF, Inspecteur Général d'Armement.
b/U.I.M. n°24/02-1959 |
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