Les Schooners construits en Amérique pour l'Etat Français 1917-1919.
Commande de 40 schooners de 3.000 tonnes d.w., 5 mats goélette à propulsion auxiliaire mécanique, 280 pieds de long avec quatre panneaux de chargement et trois treuils. Deux machines à triple expansion de 350 HP actionnées par la vapeur de deux chaudières à tubes d'eau, chauffe au charbon, montées de chaque coté de la ligne centrale et entrainant chacune sa propre hélice. Ces goélettes étaient prévues se déplacer rapidement avec un équipage réduit pour être utilisées pour le ravitaillement de grands navires de guerre plus lents.
Caractéristiques des schooners cinq mats.
8 schooners 4 mats, dits de "Terre Neuve", pour la surveillance de la pêche.
Les schooners en bois, bien qu'ayant la première cote au Veritas étaient mal calfatés, au mastic, construits en bois vert, avec des voilures mal disposées, et des chaudières aux tubulures défectueuses. Ces voiliers auront une vie très courte, ils naviguèrent si peu que le public, habitué à les voir constamment amarrés le long des quais ne connut leurs longues files immobilisées que sous le nom de "Flotte aux pieds nickelés". Schooners construits sous contrat avec le gouvernement français. A Tacoma, le chantier fut édifié spécialement pour honorer ce contrat avec les moyens les plus modernes pour l'époque. Dix navires étaient construits en même temps sur ses cales. A la fin de juin 1918 six navires avaient été lancés et deux étaient prêts à prendre la mer. Le 11 novembre 1918 a marqué la fin de la guerre et le travail a cessé sur les navires restant sur cale. Le chantier naval a fermé en 1919 et les bateaux inachevés ont été brulés pour la récupération du métal en juin 1926. Le chantier Foundation Co était situé sur 50 acres de Tideflats Tacoma et fut le plus important chantier de bois du monde. Lorsque la guerre prit fin en 1918, treize navires étaient encore sur cale non terminés. Ils ont été amarrés dans le lac Union à Seattle puis, vendus à la ferraille, remorqués jusqu'à l'embouchure du ruisseau qui alimente Minter dans Henderson Bay et incendiés. Les cabines et les superstructures furent brisées, arrosées de pétrole et à 23 h 45 les navires furent mis en feu. De minuit à l'aube, une lueur rouge a illuminé le ciel au nord ouest de Tacoma. Goélettes 5 mats à machine auxiliaire. 1919, Les schooners à vapeur arrivent. Sont arrivés le 27 sur rade du Havre, deux des premiers schooners à vapeur, gréés en cinq mats goélette, qui ont été achetés en Amérique pour le compte du Transit Maritime. Le premier a le nom de "Vimy" et vient de Cardiff; le second n'a pu être reconnu. Nous croyons savoir qu'on attend 40 navires de ce type. ajoutons que plusieurs équipages sont partis du Havre pour en prendre livraison en Amérique. (Ouest-Eclair, 1919-05-02).
Presse. 1920, La très mauvaise qualité dans la construction de ces navires, obligea à les désarmer en rade de Brest. Les chaudières des schooners à 5 mats sont a remplacer après à peine un an de service. Les carénages sont à refaire pour la plupart d'entre eux. (Ouest-Eclair, 1920-12-03).
1921, La presse avait pour consigne d'en parler le moins possible ; Parmi les rares articles parus, voici celui d'un correspondant brestois, daté du 29 mars 1921, qui disait ceci : La rade de Brest est devenue comme un immense cimetière de navires en bois, alignant leurs plus beaux spécimens, dressant la forêt de leurs mâts et entrecroisant la ramure de leurs vergues. On dirait que toute la flotte que l'Etat a fait construire en Amérique est venue s'échouer là ; on a toutefois eu soin de ne point les ancrer au même lieu, comme si on voulait dissimuler le scandale. Dans l'estuaire de l'Elorn, en face de la pyrotechnie de Saint-Nicolas, voici tassés, bien serrés, les uns contre les autres : le "Capitaine Guynemer", le "Général Baratier", le "Général Maunoury", le "Givenchy", la " Justice", le "Lunéville", le "Nancy", le "Noyon", le "République", le "Souchez", le ""Saint-Avold", le "Schlestad", le "Sarre-Union", le "Thann", le "Wimy", le "Wissembourg", l' "Imperator", le "Point du Jour". Quand l'estuaire de l'Elorn fut encombré, on les conduisit en baie du Fret, où on les entassa pêle-mêle : le "Gros Tenquin", le "Lorquin", le "Marmoutiers", le "Sarrebourg", le "Saverne", le "Sierck", le "Schirmeck", le "Saint-Amarin", le "Thionville", le "Wasselonne", le "Colonel Driant", le "Commandant Challes", le "Gerbervillers", le "Péronne", le "Soissons", le "Toul", le "Cauchy", le "Laplace", le "Lagrange", le "Poinsot", le "Poncelet", l' "Acadie", le "Frontenac", le "Toronto", le "Winnipeg", le "Bonfeld". Mais, comme c'était déjà trop d'exposer aux yeux du public ces lamentables laissés pour compte, on a cherché d'autres lieux pour y cacher un surcroît de bâtiments et, dans la baie de Landévennec, on a pu loger encore : l' "Amiens", le "Calgary" (ex-"Hudson"), l' "Egalité", le "Sarreguemines", la " Vérité". Adroitement disséminés dans les bassins du port de commerce où ils ont l'air, pour les profanes, d'effectuer des travaux de chargement et de déchargement, on trouve : le "Belfort", le "Velay", le "Limousin", le "Kerhor", la " Caille" (trawler ?), le "Brasilia", le "Château-Salins", l' "Inhambane" (ex- "Essen"), etc... En rade abri, la présence du "Sigen" (ex-"Pelican", schooner 4 mats) n'attire plus guère l'attention et comme le public ne peut accéder à la Ninon, on a caché là encore : la " Démocratie" et le "Graf-Seremyl-Bela" avec de plus petites unités. Quant au "Lucy Woermann", au "Prinzessin", au "Steigerwald", ils tirent inlassablement sur leurs chaînes depuis des mois et des mois. D'autres navires de la flotte d'Etat sont attendus incessamment et seront encore désarmés dans notre rade, qui en abrite déjà soixante-trois. On se demande qui préside à ces incroyables fantaisies et surtout si les contribuables verront bientôt la fin de cette note à payer, qui s'allonge chaque jour.
Brest n'était pas seul à connaître un tel spectacle ; en rivière de Nantes, au canal de la Martinière, loin des regards indiscrets, un autre cimetière avait été aménagé ; là pourrissaient aussi de nombreuses unités de la flotte d'Etat et, avant même qu'il fut rempli, on dut répartir, partout où l'on pouvait les loger, une trentaine d'autres bateaux.
Il y en avait de véritables grappes amarrées dans le vieux port à Marseille. Quelques uns aussi à Dunkerque. Tous étaient en vente à des prix très bas, mais les acheteurs ne se pressaient pas, sachant que l'Etat les livrerait tôt ou tard pour des sommes infimes. Bien que coûtant moins qu'à naviguer, ils revenaient encore cher à l'Etat, qui payait une petite armée de gardiens qui ne surveillaient pas grand' chose, car le matériel du bord disparaissait chaque jour par quantités importantes. Dans les campagnes environnantes, on trouvait, provenant de leurs bords, des services de table complets, draps de lits, couvertures, batteries de cuisine, conserves, chaînes, filins, etc... Le reste, sans entretien, pourrissait lentement, devenant invendable ; c'est alors que fut décidée la liquidation des cimetières. Le coût total de la flotte d'Etat (vapeurs compris) dépassait 700 millions de francs. Le déficit d'exploitation n'a jamais été connu exactement et fut probablement énorme. J'ai assisté à la séance de la Chambre des députés, en laquelle fut discutée la liquidation de la Flotte d'Etat. Peu de députés y assistaient, les questions maritimes ne les intéressant guère. On a conté qu'à une réunion à ce sujet M. Bouisson, député de Marseille, directeur de la Flotte d'Etat, mis en cause par l'amiral Guépratte au sujet de sa gestion, se borna à lui répondre à peu près ceci : "Veuillez me dire, amiral, sur quoi vous vous basez pour dire que nous avons coûté cher à la France ; nous n'avons jamais eu de comptabilité bien exacte et j'ignore si nous sommes en déficit ou en gain". Les auditeurs éclatèrent de rire ; l'affaire était classée, les contribuables payèrent une fois de plus. L'incendie des documents de la flotte en bois, place Fontenoy, vint à point pour rendre inutile une enquête que personne ne désirait ; quelques décorations nouvelles furent distribuées, avec un certain nombre de sinécures. Dans les divers ports où ils étaient stationnés, les agents du Transit procédèrent à la liquidation du matériel entreposé à bord, ce fut une opération déficitaire pour l'Etat, mais intéressante pour certains. Peu à peu, les navires disparurent, envoyés à la démolition. Certains, comme le "Péchiney", firent de la pâte de papier, d'autres des caisses d'emballage, etc... Source : Lacroix Louis, Les Ecraseurs de Crabes sur Les Derniers Voiliers Caboteurs, Aux Portes du Large, Nantes, 1947. pp. 293-295.
1921, décembre, Il reste à liquider 25 voiliers de la flotte d'Etat, 33 schooners à vapeur et 31 cargos.
1922, décembre, Vente de navires de l'ancienne flotte d'état. Les schooners "Général-Maunoury", "Général-Baratier", "Soissons", "Noyon", "Commandant-Chales", "Lunéville", "Toul", "Vérité", "Amiens", "Démocratie" et les barges "Saint-Amarin" et "Gros-Tenquin" ont été vendus à des firmes allemandes. Les schooners "Thaux", "Vimy", "Egalité" et "Belfort" à une entreprise américaine et les "Givenchy" et "Wissembourg" à une maison française. Ces navires avaient été cédés par le Transit Maritime aux "Armateurs Français" et se trouvaient en rade de Brest. (Ouest-Eclair, 1922-12-21). Récits.
" Si ces navires figurent parmi les unités inscrites au registre de la Marine Marchande, ils étaient surtout une flotte d'Etat nationalisée, ignorant tout des méthodes commerciales. On a dit en parlant d'eux qu'ils avaient inscrit une triste page dans l'histoire de nos navires de commerce. On aurait mieux fait d'écrire que la coûteuse et pitoyable expérience tentée par nos dirigeants politiques en marge de notre cabotage a démontré de façon irréfutable leur incapacité en matière d'armement. Ils naviguèrent si peu que le public, habitué à les voir constamment amarrés le longs des quais de nos ports, ne connut bientôt leur longues files immobilisées pendant des mois en nos villes maritimes que sous le nom de "Flotte aux pieds nickelés". Il cite les commentaires d'un officier de marine marchande français qui avait pu visiter l'un de ces navires en construction au Canada : " Ces navires semblent lourds et sont mal mâtés, avec un gréement qui les écrase. L'échantillonnage des pièces est plutôt trop fort, mais leur liaison est mal assurée. Ces navires prendront rapidement de l'arc à la mer et seront fréquemment en avarie de machine. Il est impossible d'assurer une bonne tenue des lignes d'arbres des hélices et les paliers chaufferont très rapidement avec le jeu du navire. Des détails importants montrent que ceux qui ont surveillé la construction de ces navires ne sont pas au courant de leur métier. Ainsi, l'alimentation en eau douce des chaudières est assurée par des caisses en tôle situées à l'extrême avant, dans le peak avant. Cette eau arrive aux appareils évaporatoires par de longues tuyauteries traversant toute la cale d'un bout à l'autre. Elles sont amenées à se rompre fréquemment dès que le navire fatiguera et aucune réparation ne sera possible puisque l'accès sera interdit par les marchandises embarquées. En revanche, celles-ci seront inondées." Il concluait : " Ces navires en bois vert, mal surveillés et mal construits, pourvus d'une mâture trop faible pour naviguer à la voile et d'une machine trop peu puissante pour marcher à la vapeur, sont inexploitables commercialement parlant et incapables de rendre le moindre service. En construisant ces canards boiteux, on a réalisé tout ce qu'on peut imaginer d'erreurs dans la conception d'un navire". A propos des quelques voyages tentés par ces schooners, véritables désastres commerciaux, Lacroix cite quelques anecdotes désopilantes, signalant toutefois que les services du "Transit Maritime", émanation gouvernementale qui gérait et armait ces navires, entretenaient un nombreux personnel, grassement payé, peu chargé en travail et irresponsable en toutes circonstances...
Mais le principal problème venait d'une construction en bois de spruce, mou et vert, qui en séchant donnait lieu à de continuelles voies d'eau. De plus, l'arrimage des marchandises dans ces énormes cales était difficile et coûteux. Bref, ces navires étaient inaptes au long cours, dangereux le long des côtes, et en perdition dès que le vent forcissait car ils ne pouvaient s'élever de la terre ni à la voile, ni au moteur. Il y eu seulement huit pertes par fortune de mer, mais si ce nombre est demeuré si peu élevé, c'est parce que ces schooners n'ont quasiment pas navigué. Finalement, ces navires furent rapidement désarmés et l'on vit la rade de Brest devenir un immense cimetière de navires en bois. Il furent un peu disséminés afin de dissimuler le scandale, dans l'estuaire de l'Elorn, dans la baie du Frêt, dans la baie de Landevennec, dans les bassins du port de commerce de Brest, dans le canal de la Martinière, près de Nantes, ou encore à Marseille. Pour finir, un débat sur ce scandale eût lieu à la chambre et l'amiral Guépratte (député inscrit à la gauche républicaine) interpella vigoureusement le député de Marseille qui était aussi le Directeur de la Flotte d'Etat. Celui-ci répondit : "Veuillez me dire, amiral, sur quoi vous vous fondez pour dire que nous avons coûté cher à la France? Nous n'avons jamais eu de comptabilité exacte et j'ignore moi-même si nous sommes en déficit ou en gain". Cette réplique provoqua l'hilarité des députés... et l'affaire fut classée. Un incendie providentiel détruisit toutes les archives de cette flotte en bois au ministère de la place Fontenoy. Cela rendit inutile une enquête que du reste personne ne souhaitait. Les contribuables payèrent donc la note. Source : Lacroix Louis, Les Ecraseurs de Crabes sur Les Derniers Voiliers Caboteurs, Aux Portes du Large, Nantes, 1947. pp. 276-299.
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Five-masted schooners with aux. machinery Of this list of 71 five-masted schooners with aux. machinery which were built in 1916-1918, the French Government ordered 40 five-masted schooners equipped with auxiliary steam machinery to be built in Oregon and Washington. Most of these five-masted schooners got a very short life and the majority of the schooners ordered by the French Government were laid up after the war.
Sources, Lacroix Louis, Les Ecraseurs de Crabes sur Les Derniers Voiliers Caboteurs, Aux Portes du Large, Nantes, 1947. pp 282-285. Presse d'époque, Ouest-Eclair, Miramar shipindex. Alain de Serdac, Marine en bois, Editions des Portiques, 1932. Lacroix Louis, Les Ecraseurs de Crabes sur Les Derniers Voiliers Caboteurs, Aux Portes du Large, Nantes, 1947. Picard H. Les schooners à vapeur de notre flotte d'Etat (1917-1923), CNRS, Marseille,1983, no134, pp. 112-117. http://www.sjohistoriskasamfundet.se/LB/Nautica/Ships/Schooners/Schooners(aux).html
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